Figure emblématique du cinéma et de la communauté afro-américaine, Sidney Poitier, originaire des Bahamas, fut le premier acteur noir à recevoir en 1964 la récompense suprême pour tout acteur : l’Oscar du meilleur acteur pour son rôle de Homer Smith dans le film « Le Lys des champs ».
Né aux Etats-Unis alors que sa mère y était en voyage, il a par le droit du sol la nationalité américaine. Toutefois, il passe ses 15 premières années sur l’île Cat aux Bahamas dans le village de ses parents. Dans l’espoir de lui faire fuir la délinquance, ses parents l’envoient à Miami rejoindre son frère. Sidney Poitier est alors confronté à l’Amérique ségrégationniste des années 40. Il quitte donc le Sud à 16 ans pour la progressiste New York où après avoir exercé des petits boulots alimentaires, il finit par intégrer l’American Negro Theater, grâce à des mois de travail. Il est rapidement repéré par un directeur de casting et décroche un petit rôle à Broadway.
Il obtient son premier rôle au cinéma à la fin des années 40 et ce sont les années 50 qui voient sa carrière se développer. Nommé une première fois aux Oscars en 1958 pour son rôle dans « La Chaîne », il lui faut attendre 1964 pour obtenir cette récompense tant convoitée.
Ce n’est certainement pas un hasard si Sidney Poitier fini par être reconnu pour son talent en cette année de 1964, car c’est également l’année de l’adoption du « Civil Rights Act », loi fédérale ayant permis la prohibition des lois & réglementations ségrégatives sur l’ensemble des Etats-Unis. Militant du Mouvement américain des droits civiques aux côtés de Rosa Parks, Malcom X, Martin Luther King et bien d’autres, Sidney Poitier a contribué à l’avancé des droits des afro-américains et a permis leur représentation aux yeux d’un large public international.
La filmographie de Poitier est riche et l’on serait tenté de conseiller de voir le film pour lequel il a été primé. Cependant, j’aimerais vous inviter à voir ou revoir « Graine de violence » sorti en 1955 dans lequel il interprète un jeune dans une banlieue pauvre, en prise avec la violence dont le destin sera changé grâce à la venue d’un jeune professeur plein d’entrain qui redonnera de l’optimisme à ses collègues démissionnaires et une lueur d’espoir à ces élèves désabusés. Film avant-gardiste pour son époque, il montre non seulement que l’éducation peut aider la jeunesse à s’émanciper et à s’extirper de sa condition, mais c’est également le premier film à mettre du rock’n’roll dans la bande originale avec « Rock Around the Clock » de Bill Haley et ses Comets.
Sidney Poitier nous a quitté en ce 6 janvier 2022 et laisse derrière lui une filmographie riche, reflet d’une époque.
Bien entendu, certains diront que ses rôles écrits et filmés par des blancs étaient quelque peu stéréotypés mais il a su les choisi et en tirer le meilleur afin de faire bouger les lignes, acte militant s’il en est dans une Amérique où le droit de vote ou encore le droit de choisir sa place dans un bus n’était pas envisageable pour une personne de couleur dans certains Etats.